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MON ENGAGEMENT MILITANT          

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- Une réaction à l’éditorial de Roland de Bodt : " La pauvreté au XXème siècle ", paru dansla  Lettre de Culture et Démocratie n° 41. 19/02/02010

 

Effectivement, la pauvreté ne tombe pas du ciel. Elle n’est pas seulement un effet, certes aggravé, de la crise économique actuelle. En cela, Roland de Bodt énonce une évidence, dont les causes sont enfouies loin dans l’histoire.
Le tournant qui marque la prise de conscience de la "question sociale" a eu lieu en effet àla Révolution française... et avec les écrits de Charles Dickens, Victor Hugo, Engels qui émettent une critique immanente du libéralisme. En France, paraissait également, en 1831, la revue "l’Echo de la Fabrique" rédigé par des ouvriers et des publicistes.

Le jeune Léon Bronstein (plus tard devenu Léon Trotsky) participe en 1880 à la fondation de "l’Union ouvrière dela Russie du Sud" qui, au départ, rassemble une centaine d’ouvriers. Je pense aussi aux "Cahiers de Doléances des Infortunés" rassemblés par le fonctionnaire Dufourny de Villiers (en France), qui nomma cette population le "Quatrième Ordre", terme fondateur du sous-prolétariat.

Ajoutons "le Peuple d’En-Bas" de Jack London, "la Misère du monde" du sociologue Bourdieu, plus récemment "les Naufragés" de Patrick Declercq… Les chercheurs poursuivent inlassablement leur quête !

Pour nous, à la réflexion, ce qui progresse lentement, difficilement et comme marchant à l’écrevisse, c'est la conscience collective, le ressenti de cette injustice "intolérable" que doivent supporter les plus pauvres de nos sociétés développées et, de manière explosive, ceux qui vivent dans les régions du monde où prolifèrent les bidonvilles, les slums, les favelasUne injustice qui est la conséquence d’un système basé sur une économie de marché ultralibérale liée à des mécanismes de dominance de groupes ; les analyses ne manquent pas à ce sujet, surtout depuis les angoisses de la fin de l’année 2008…..


La Déclaration Universelle des Droits Humains date de 1948 ; une conséquence plus récente de ses effets est la "Cour Européenne des droits de l’homme à Strasbourg". Savons-nous qu’une famille en grande précarité dont la garde des enfants est retirée suite à un jugement dans un pays de l’Union Européenne, peut monter un dossier avec l’aide d’avocats dévoués à leur cause, et l’introduire à Strasbourg pour contester ce verdict ; si, auparavant, toutes les procédures dans ledit pays ont été épuisées,la Cour européenne peut infirmer une telle décision. Il manque
cependant, à ce stade, les effets juridiques contraignant l’Etat désavoué .

Travail lent et obscur, en priorité pour les pauvres ; pédagogie tout aussi diffuse marquée d’invisibilité dans la conscience collective… mais sans doute non dénuée de sens, à long terme.
La révolution culturelle, alors, est bien un changement radical si nous considérons le peuple universel des pauvres comme acteurs prioritaires d’émancipation humaine. Ce critère s’avère incontournable au regard de l’évolution de notre condition d’homme ; les exclus deviennent source et force d’inspiration dans nos luttes pour la transformation des systèmes économiques et politiques que nous avons contribué à construire, protéger et même sauvegarder au prix de la souffrance sociale.

Dominique Rammaert